
Voici la restranscription manuscrite que ma grand-mère Anne-Marie Bertin (nom de jeune fille Lepers) de la chanson "révolutionnaire" des gens du Morvan. Pour resituer le contexte, il faut savoir que la région, assez rude, a longtemps servi la capitale Paris. D'abord en fournissant le bois de chauffage (mais également de construction - notamment Notre Dame de Paris), puis l'eau (c'est la raison de la construction du barrage du lac des Settons je crois) et, pire, des nourrices morvandelles (que raconte le film de Renaud Bertrand "la Nourrice" qui a obtenu le Grand prix du jury au festival de Luchon en 2004) qui partaient à Paris donner leur lait aux enfants des familles riches (et finissait parfois sur le trottoir).
Afin que vous puissiez bien tout lire et avoir l'intégralité des paroles (il manque un couplet dans la version de ma grand-mère), en voici une transcription de la chanson de Maurice Bouchor
La Morvandelle
Les paroles sont de Maurice Bouchor .
La mélodie est une vieille chanson morvandelle :“le galant d’lai Nan-nette”.
Allons les Morvandiaux, chantons la Morvandelle,Les paroles sont de Maurice Bouchor .
La mélodie est une vieille chanson morvandelle :“le galant d’lai Nan-nette”.
Chantons les claires eaux, et la forêt si belle,
La truite au bond léger dans les roseaux fleuris
Et notre bois flottant qui vogue vers Paris.
Il souffle un âpre vent parmi nos solitudes,
On dit que le Morvan est un pays bien rude
Mais s’il est pauvre et fier, il nous plaît mieux ainsi
Et qui ne l’aime pas n’est certes pas d’ici.
On veut la liberté dans nos montagnes noires
Nos pères ont lutté, pour elle et non sans gloire,
Rêveurs de coups d’état, Césars de quatre sous
Les braves Morvandiaux se moquent bien de vous.
Jadis, on nous l’a dit, surgirent nos ancêtres
Brisant le joug maudit de leur avides maîtres
Ils firent bien danser les moines leurs seigneurs
Repus de leur misère et gras de leur sueur.
Pourtant nous subissons un reste d’esclavage
Pourquoi ces nourrissons privés du cher breuvage,
Gardons ô mes amis, nos femmes près de nous
Nos filles et nos fils ont droit à leurs nounous.
Allons les Morvandiaux, chantons la Morvandelle
Les bois, les prés, les eaux, aimés d’un coeur fidèle,
Nos bûches qui s’en vont, Paris s’en chauffera
Nos gars et leurs mamans, Paris s’en passera.
Plusieurs remarques :
- d'abord il est intéressant de noter que ma grand-mère, qui était une catholique très pratiquante, a fait l'impasse sur le couplet anti-clérical...
- les "rêveurs de coup d'Etat et Césars de quatre sous" font référence à Napoléon III et son coup d'Etat de 1851. Je crois d'ailleurs que le député de Clamecy (dont je dois retrouver le nom) avait été tué par la maréchaussée sur les barricades qui ont suivi le coup d'Etat.